Durant le mois de Ramadan, nous vous proposons une série de témoignages de mamans sur leur vécu de ce mois béni, soit en étant enceinte, soit en allaitant. La question qui revient souvent : qui a déjà fait le Ramadan en étant enceinte? En allaitant ? Avec des enfants en bas-âge ? Comment cela s’est-il passé ? Etc.
Chaque sœur a son vécu et les partages d’expérience sont cruciaux pour soit se motiver en réalisant que d’autres l’ont fait, soit se déculpabiliser en réalisant que d’autres ne l’ont pas fait, et par la même occasion, récolter de précieux conseils concernant ces différentes situations.
TÉMOIGNAGE Maman #3, Najat
Ramadan, c’était mieux avant …d’avoir des enfants ? Ou à chacune son Ramadan ?
En même temps que je choisis ce titre, la voix terrible de la culpabilité gronde en moi : comment puis-je oser écrire ces mots ? Ne devrais-je pas être dans la gratitude envers mon Seigneur, point ? Mais ce titre se veut avant tout provocateur bien sûr pour essayer de passer des messages aux mamans.
Je vais simplement dire des vérités que certaines d’entre nous vivent mais n’osent pas partager par peur d’être jugées : la douleur de vivre un mois de Ramadan « raté » avec des enfants en bas-âge, un quotidien souvent synonyme de nuits hachées, de cris, de pleurs, de crises interminables.
Je vivais le Ramadan autrement avant d’avoir des enfants. Il avait une autre saveur soubhannallah : ton cœur était disponible et en paix, ta tête aussi et ton corps reposé. Et puis un jour, tu as des enfants !
Lors des premières années avec mes enfants, la simple évocation de l’arrivée du Ramadan m’attristait, me stressait plus qu’elle ne m’emballait car je savais que j’allais passer encore à côté.
J’étais déjà loin dans l’épuisement maternel. Alors, la perspective des nuits courtes et hachées m’inquiétait, la perspective de la fatigue en plus de la fatigue accumulée toute l’année également.
Comment gérer le temps avec les enfants, prier, lire le coran, passer des moments de retraite spirituelle, vivre la spiritualité de ce mois alors que j’étais déjà sur les rotules ? Comment vais-je faire pour ne pas passer à côté de ce mois de bénédictions ? Car on aimerait toutes vivre un Ramadan spirituel, avec des adorations augmentées.
Et puis un jour où je me faisais toutes ces réflexions, Allah a mis sur mon chemin l’article d’une sœur. Ses mots avaient su apaiser mon cœur. Ses mots m’avaient rassurée. J’espère que mes mots sauront te faire du bien aussi.
Je n’étais pas la seule à avoir peur de passer à côté de ce rendez-vous avec Dieu.
Je n’étais pas la seule à me dire : est-ce que je vais y arriver ? Est-ce que je vais arriver à renverser ma routine quotidienne ? Est-ce que je vais arriver à sortir la tête de l’eau, de mon tourbillon quotidien ? Est-ce que je vais arriver à casser ce rythme ?
C’est donc normal pour une maman d’appréhender ce mois sacré. Je ne suis pas la seule à être préoccupée par la façon dont j’allais gérer et survivre à ce mois; je ne suis pas la seule à me poser la question de comment tirer profit de ce mois exceptionnel avec des enfants en bas âge.
Mais est-ce que j’ai le choix ? Avec nos enfants, le temps ne nous appartient plus. On vit souvent dans l’imprévisibilité.
Et là, j’ai compris. Je vais faire ce que je peux avec l’aide d’Allah.
Et aussi, c’est peut-être la meilleure chance de ma vie pour revoir certaines compréhensions.
Le Ramadan avec des enfants est l’occasion pour moi de revoir mon rapport aux adorations. Certes, le Ramadan est le mois spirituel par excellence, mais que vaut la quantité au détriment de la qualité ? Que valent des lectures complètes du Coran sans qu’on se soit arrêté sur la signification ne serait-ce que d’un seul verset?
Le mois du Ramadan n’est-il pas le mois de la remise en question ? C’est alors l’occasion pour moi de diminuer certaines de mes exigences au quotidien, par rapport à mon foyer, envers moi-même et envers mes enfants.
C’est l’occasion pour moi de me souvenir aussi que m’occuper de mes enfants, c’est aussi une adoration. Je devais donc faire un travail sur mon intention.
C’est l’occasion de repenser mon rôle de mère. Je ne suis pas une mère parfaite et je ne le serai jamais, mais je dois simplement œuvrer pour être une mère qui fait de son mieux, une mère qui espère l’acceptation et la bénédiction divine.
Voilà, c’est cet état d’esprit-là que je dois nourrir. Certes, le Ramadan est une occasion exceptionnelle de s’exposer au pardon de Dieu et d’espérer Sa miséricorde ; c’est une occasion exceptionnelle pour parcourir des distances spirituelles qu’on ne pourrait pas atteindre à d’autres moments de l’année. Mais moi, aujourd’hui, j’ai cette responsabilité d’être une maman au quotidien, de prendre soin de mes enfants en bas âge. Et ce temps-là passé auprès d’eux, cette fatigue accumulée à leur côté pèsera aussi, inchaAllah, dans ma balance le jour de la Résurrection.
À chacune donc son Ramadan ! Je me rappelle d’un dessin de Muslim Show que m’avais partagé une amie sur WhatsApp : il représentait une maman au-dessus du berceau de son bébé, avec un message : « à chacun son qiyam el leyl », à chacun sa veillée. Oui, certains passent la nuit dans les mosquées à prier, et certaines passent leur nuit avec leurs bébés, tantôt à les bercer, tantôt à les coucher, tantôt à les allaiter ou à leur apporter un verre d’eau, tantôt à les consoler après un cauchemar, tantôt à leur chanter une berceuse pour les rassurer…. Alors, qu’Allah purifie nos intentions, nous guide et accepte la plus petite de nos adorations, amine.
Tellement parlant et déculpabilisant ! C’est vraiment pas facile d’accepter la frustration de ce qu’on aimerait faire et qu’on ne peut plus faire, mais comme tu as dit, c’est le moment de revoir nos intentions ! Merci bcp Najat